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XXV

1. On t’a préféré quelqu’un, soit pour l’inviter à un repas, soit pour le saluer, soit pour l’appeler à une délibération ? Si ce sont là des biens, tu dois te réjouir de ce qu’il les a obtenus ; si ce sont des maux, ne t’afflige pas de n’en avoir pas ta part : souviens-toi que quand tu ne fais pas la même chose que les autres pour avoir ce qui ne dépend pas de nous, tu ne peux pas prétendre en avoir autant. 2. Et comment celui qui ne fait pas une cour assidue1 à un grand, peut-il être traité comme celui qui la fait ? celui qui ne lui fait pas cortége2, comme celui qui le fait ? celui qui ne le loue pas, comme celui qui le loue ? Tu seras injuste et insatiable, si, sans avoir payé le prix, tu veux recevoir pour rien ce qu’il vend. 3. Voyons, combien se vend la laitue ? Supposons que ce soit une obole3. Quand quelqu’un a de la laitue en donnant son obole et que toi tu n’en as pas en ne donnant pas la tienne, ne crois pas être moins bien traité que celui qui en a. S’il a sa laitue, toi, tu as ton obole, que tu n’as pas donnée. 4. De même ici. Quelqu’un ne t’a pas invité à un repas ? C’est que tu n’as pas payé le prix auquel il vend son repas ; il le vend pour des compliments, il le vend pour des soins. Paye le prix auquel il vend, si tu y trouves un avantage ; mais si tu veux à la fois ne pas payer et recevoir, tu es insatiable et imbécile.

5. N’as-tu donc rien à la place du repas ? Oui, tu as quelque chose, tu as de ne pas louer qui tu ne veux pas, tu as de ne pas essuyer les insolences des esclaves qui gardent sa porte4.