Page:Marais - La Nièce de l'oncle Sam (Les Annales politiques et littéraires, en feuilleton, 4 août au 6 octobre), 1918.djvu/107

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XV

Warton revint au jour dit. Par une inspiration délicate, il apportait une gerbe de roses à Mme  d’Hersac, des roses-thé cueillies dans les jardins de Neuilly-sur-Marne. Les fleurs odorantes et chaudes, brûlées de soleil, exhalaient tous les parfums du dehors ; l’air pur, l’herbe coupée, la brise tiède d’un beau jour d’automne s’offraient à la recluse avec l’arôme des pétales brunis. La malade, à leur vue, eut un petit sourire de bonheur qui anima son visage creusé. Puis, elle s’assoupit doucement, le nez sur son bouquet.

Ils la regardaient dormir ce sommeil d’enfant qui ramenait une expression ingénue sur ses traits pacifiés. Sommeil béni, laps de détente qui coupe les heures d’inquiétude, repos précurseur de la convalescence.

Jack Warton se retirait sur la pointe des pieds. Au moment où il allait partir, un coup de sonnette brusque et bref retentit à la porte d’entrée. Laurence eut un frémissement d’impatience en regardant vers le lit : mais la malade n’avait pas été réveillée.

La bonne était en courses. La jeune fille alla ouvrir elle-même. Sur le seuil, une élégante silhouette féminine : Bessie Arnott. L’Américaine commença, en souriant malicieusement :

— Vous ne me reconnaissez pas ? Laurence répondit d’une voix morne :

— Si, mademoiselle… Le docteur Warton m’a déjà mise au courant…

— Ah ! l’indiscret…

Bessie ébaucha une petite moue, et murmura :

— Décidément, il est écrit qu’avec vous je manquerai tous mes effets.

Elle ajouta, en s’écartant, d’un air mutin :

— Pas celui-ci, toujours.