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pense au violoniste Halberger qui compose, travaille, organise ses programmes, dirige son orchestre, le sourire aux lèvres, et qui jamais ne se lamente de ses efforts ni de son labeur. Elle songe à tous les besogneux modestes qui travaillent gaillardement par la ville.

À rebours de son mari, Marthe ne critique point l’inaction de la jeune fille ; mais, elle lui reproche toutes ses actions. Claude ne peut lui rendre un service sans se faire taxer de maladresse, ni s’efforcer de l’aider à tenir son intérieur sans que Marthe l’accuse de vouloir être la maîtresse.

Ces vexations quotidiennes torturent la jeune fille d’un supplice irritant et sournois ; elle a la sensation de subir de perpétuelles piqûres de moustiques. Il est des instants où elle se dit : « J’en ai assez… c’est intolérable… je vais partir… » Partir pour où ? Que faire ? Que tenter ? Et Claude baisse la tête, accablée par son impuissance : elle n’a rien et n’est capable de rien. Elle a suffisamment vécu — d’une vie humble qui côtoyait la pauvreté — pour connaître les difficultés du struggle for life, l’im-