Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/196

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C’est un homme vigoureux, autoritaire et bourru, dont la franchise conquiert l’estime des honnêtes gens et la haine des imbéciles. Léger, jouisseur, généreux, incapable de calcul, apportant une bravoure têtue à défendre ses opinions, il est de vraie souche gauloise, et son tempérament bien français d’artiste viveur et insouciant, tranche heureusement sur notre génération d’êtres mercantiles.

Je l’aimai beaucoup, dès le premier jour. Quand Robert Valin — un peu débraillé, le veston flottant sur ses larges épaules, la lavallière bleue effilochée, nouée négligemment sous le faux-col étincelant — entrait chez moi pour se concerter avec Paul, qu’il nommait gouailleusement le « patron », le sachant bien son véritable directeur, je me sentais tout de suite réconfortée. Robert, avec la finesse malicieuse de ses yeux gris, l’entregent de ses manières, l’astuce de son laisser-aller bon enfant, et la façon dont il organisait la campagne de presse contre Bouvreuil et l’Agioteur, m’inspirait confiance. Physiquement même, sa force semblait le désigner comme un appui.

Depuis une quinzaine, l’attaque fut menée rondement, quoique sourdement. Suivant l’ins-