Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/205

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bonheurs dont on est aussi certain ; ils tiennent plus de l’ombre que de la proie. Nous nous sommes accotées au rempart d’un buisson ; des fleurettes s’accrochent, s’entremêlent aux sombres cheveux de ma jolie compagne ; un rayon de soleil caresse la blancheur lumineuse de ses joues duvetées, traverse d’une clarté rosâtre les phalanges de ses mains fluettes, brille au reflet ivoirin de ses dents humides. Elle continue, en souriant d’un air assuré :

— Julien est venu implorer son pardon. Vous le saviez, n’est-ce pas ? puisque c’est vous, sans doute, qui me l’avez renvoyé… Oh ! madame Nicole, vous êtes si fine… Vous vous êtes bien doutée que j’ai eu le cœur gros, après mon grand élan de fierté. Et puis, ç’aurait été vexant qu’il partît ainsi… J’aurais voulu le revoir, rien que par amour-propre. Oh ! certes, je ne l’aime pas comme avant, quand même… Je pense aux vilaines choses que vous m’avez dites…

— Alors, vous regardez Julien, et les vilaines choses s’effacent…

— Non, elles font un peu d’ombre au-dessus du visage. J’ai honte qu’il me plaise encore un peu, malgré l’ombre…