Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/216

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précieuse vierge byzantine. Et c’est très amusant d’entendre cette fleur d’Orient se lamenter de ne plus pouvoir s’habiller rue de la Paix. Je veux la consoler :

— Réjouis-toi, Nadine ! Les couturiers t’attifaient à la manière de n’importe quelle poupée de Paris. Ta personnalité se dégagera bien mieux d’une robe sans chic. Sais-tu quelle est celle de tes toilettes qui t’avantage le plus ?… Ton costume de danseuse, dans Aphrodite : ce costume qui se compose d’une ceinture sans chasteté et d’un collier de cuivre rouge… Tant que tu auras la possibilité de le porter, ne te préoccupe point des autres…

À l’idée de se promener par les rues, vêtue seulement d’une ceinture et d’un collier, Nadine est prise de fou rire. La tête renversée, la bouche largement ouverte, elle s’esclaffe, oubliant ses larmes, ses anxiétés ; j’aperçois le fond de sa gorge, son palais rose, un point d’or qui brille au creux d’une molaire… Rassérénée, elle se dispose à partir. Je l’accompagne jusqu’au perron. Dehors, des camelots crient : « L’Agioteur !… Troisième édition… Demandez l’Agioteur ! » J’enfonce mes dents en pleine chair, jusqu’à faire saigner la lèvre…