Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/375

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que soit leur esprit, sentent toujours leur cœur s’émouvoir aux larmes de leur seconde chair.

La petite se précipite sur le lit avec un cri atroce, une longue plainte rauque de bête. Ses mains s’attachent aux cheveux dorés, sa bouche se colle à la joue inanimée. Son désespoir hoquette en sons inarticulés qui me font mal. Que son attitude contraste avec mon insensibilité d’étrangère : voilà la véritable amante ! Si c’était elle qu’il eût choisie !… Pourquoi faut-il que l’amour se trompe si souvent d’adresse ? Elle adorait l’homme qui prétendait se détruire à cause de moi, et ce fut également mon lot, jadis, de m’éprendre d’un indifférent…

Sylvie gémit, en passant ses doigts sur les paupières closes :

— Julien !… Ses beaux yeux bleus… Dire que je ne reverrai jamais plus ses beaux yeux bleus !

Je soupire profondément. Sylvie m’aperçoit, se redresse d’un jet, me lance un regard égaré, et clame violemment :

— C’est vous qui me l’avez tué ! Mauvaise Nicole… Sans vous, il serait vivant, il m’aime-