Page:Marais - Pour la bagatelle.djvu/50

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bien des gens de sa race, il possédait un aplomb de surface qui masquait une certaine timidité de caractère. Et, très roué, il sentait que cette femme serait faible et rebelle à la fois, qu’elle se déroberait à la première attaque trop vive, et qu’il faudrait conquérir sournoisement sa pudeur hésitante.

Alors, il imagina de se raconter sachant que toute confidence éveille un besoin de réciprocité chez celui qui nous écoute. Il déclara gaiement :

— Moi, je suis né amateur. Je n’avais de vocation pour aucune carrière. Dans ma famille, on est député et sénateur de père en fils, c’est de tradition : les Vérani ont été de tout temps des gros propriétaires fonciers très influents dans leur région. Fils unique et dernier héritier du nom, j’ai souhaité m’affranchir de la corvée professionnelle : ma famille est restée inflexible. On m’a mis dans la politique, comme on m’aurait mis dans le commerce ou dans la magistrature. J’ai dû