Page:Marais - Pour le bon motif.djvu/101

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— Mais parce qu’il est vieux… Il a, au moins, cinquante ans !

Marcel d’Arlaud reçut un choc : il évoqua, en un éclair, la silhouette sèche et droite du banquier, sa verdeur de quinquagénaire alerte. Il répéta, sur un autre ton :

— C’est vrai… Il n’a que cinquante ans !

En continuant intérieurement sa phrase : « Et moi, j’ai quarante-cinq ans : nous portons tous deux notre âge avec une légèreté pareille. Henry n’est pas sensiblement mon aîné… Alors, lui paraîtrais-je vieux, à cette jolie Gilberte ? »

Il la regardait, saisi d’une vague anxiété. À ce moment, la jeune fille ajouta avec une finesse inattendue :

— Vous comprenez, je ne suis plus assez jeune pour aimer les hommes âgés ; c’est à dix-huit ans que nous subissons cette sorte d’attraction : le prestige de leur passé…

— Dois-je en conclure que vous renoncez aux projets que j’avais formés ?

Gilberte répondit avec la gravité expérimentée des filles pauvres :

— Oh ! non, monsieur, au contraire… Je sui-