Page:Marais - Pour le bon motif.djvu/206

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nue, apercevant cette ombre postée au bord de la chaussée, s’y trompa, la crut en quête d’une voiture et vint se ranger devant elle.

Suzanne fut rappelée à la réalité par cet incident. Ainsi que les gens habitués à sortir sans beaucoup d’argent en poche, elle calcula approximativement le contenu de son porte-monnaie : cinq francs cinquante ou six francs… Elle avait de quoi payer le taxi. Elle monta et se jeta lourdement sur la banquette.

— Quelle adresse ? demanda le chauffeur en refermant la portière.

Suzanne eut un petit frisson à l’idée de rentrer chez elle : en songeant à la réception qui l’attendait : son père la harcèlerait de questions sur son absence inusitée. Gilberte et Denise l’accableraient de reproches, lorsqu’elles sauraient… Suzanne souhaitait reculer l’échéance de cette scène inévitable. Par une association d’idées, la pensée de ses sœurs évoqua celle de Marcel d’Arlaud : « Et lui… sera-t-il assez furieux, lorsqu’il saura que je l’ai trahi ! » Mais la colère prévue de d’Arlaud n’effrayait pas Suzanne, au