Aller au contenu

Page:Marais - Pour le bon motif.djvu/252

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

payé leur place, lui valaient une célébrité fructueuse.

Le fiel des confrères jaloux ne parvenait pas à troubler sa fortune persistante : dans cette absinthe, il avait l’art de butiner son miel.

Il tournait les difficultés qu’on lui suscitait, avec une confiance acharnée en son étoile : à force d’y croire, il attirait le bonheur.

Cette faculté précieuse d’appliquer à soi-même les préceptes d’une philosophie primitivement destinée à autrui, Marcel l’exerçait à cette minute.

Proclamant sa conviction : « Il ne peut rien m’arriver de désagréable », il se délectait à la pensée d’aliéner sa liberté : « Puisque ce mariage est inévitable, il doit fatalement me réussir. »

Et il en récapitulait tous les avantages : à ce tournant périlleux de la quarante-cinquième année où l’homme commence insensiblement à vieillir en conservant toutes les apparences d’une jeunesse factice, il avait la chance de séduire une jeune fille — pas assez ignorante pour être inquiétante ; assez honnête pour