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Page:Marais - Trio d amour.pdf/149

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Edmond questionna, d’un ton de reproche :

— Quand te décideras-tu à me tutoyer, Adrienne ?

Elle rougit et balbutia :

— Mais je vous assure… je ne demande pas mieux… C’est malgré moi, je n’ai pas l’habitude… C’est très difficile, dans les premiers temps.

Edmond pensait : « Ce n’est pas difficile, quand un aime. » Une brève colère le souleva contre ce cœur irrémédiablement rebelle. Son action méritante d’homme riche qui épouse loyalement une fille pauvre valait la récompense de voir Adrienne se détourner de Robert pour s’attacher à lui. « L’ingrate ! »

Il lui lança un regard irrité : mais elle avait un pauvre petit visage si malheureux ; on sentait qu’elle faisait un effort si louable pour lui plaire, que l’énervement d’Edmond se fondit en pitié.

Il songea : « C’est ma faute. Je suis vieux. Je l’ai prise, la sachant amoureuse d’un autre. »

Il murmura, avec son indulgence désarmante :

— Tu ne pourras donc jamais t’habituer à mes caresses ?