Page:Marat - Éloge de Montesquieu, éd. Brézetz, 1883.djvu/70

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
32
J.-P. MARAT

essentiellement. Comme il est inconcevable qu’une nation entière ait pu consentir à ce qu’un de ses membres fût tout et qu’elle ne fût rien, on doit regarder le despotisme moins comme un gouvernement que comme l’abus de tous les gouvernemens ; on seroit même tenté de le regarder comme une chimère, si une triste expérience n’avoit que trop appris quel empire l’imposture, l’astuce et l’adresse peuvent donner à des hommes adroits sur un peuple ignorant et désuni.

Les loix devant être relatives à la nature du gouvernement, l’auteur s’applique à déterminer celles qui constituent chacune de ces différentes formes, considérées d’une manière abstraite.

Dans la démocratie le peuple est à certains égards souverain, et sujet à d’autres égards. Il ne peut être souverain que par ses volontés ; c’est donc à lui seul à faire les loix, à choisir ses ministres, et à élire ses officiers. Ainsi les loix qui fixent le nombre des citoyens ayant droit de former les assemblées, qui déterminent la manière de donner les suffrages, qui règlent l’élection des magistrats, sont fondamentales.

Dans l’aristocratie les loix fondamentales ont les mêmes objets ; mais il y a cette différence qu’elles ne concernent qu’une partie du peuple, au lieu de le concerner en corps.

Il est de l’essence de la monarchie qu’il y ait entre le peuple et le prince des rangs intermédiaires, des pouvoirs secondaires et un corps permanent chargé du dépôt des loix : or toutes les loix relatives à ces objets sont fondamentales.

La nature du despotisme exige que dans chaque département des affaires, le prince exerce son autorité par lui-même ou par un ministre ; l’établissement du vizirat y est donc une loi fondamentale.