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Page:Marat - Les Pamphlets, 1911, éd. Vellay.djvu/247

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point qui doit vous occuper ? Le prince n’étant qu’un serviteur de la nation, l’attentat contre sa vie ne peut jamais être qu’un[1] délit particulier, tel que l’attentat contre les jours d’un autre mandataire du peuple : délit beaucoup moins grave que l’attentat contre ceux du président de l’Assemblée nationale ; abandonnez-le donc au cours ordinaire de la justice. Maintenant votre grande, votre unique affaire doit être de poursuivre le châtiment des conspirateurs contre la patrie : demandez à grands cris que Guignard soit dans les fers ; exigez que Savardin, Gouvelot, Riolles, traduits à Paris, aient double garde, qu’ils ne puissent être transférés d’un lieu dans un autre que sous l’escorte d’un commandant de bataillon, que leur procès leur soit fait sans délai, à la face des cieux et de la terre, et qu’ils expient par un supplice capital leurs noirs forfaits. Lorsque vous en aurez obtenu justice, alors, alors seulement, vous examinerez si les dénonciateurs du prétendu complot ne se sont pas moqués de vous, et vous aviserez au châtiment que vous devrez leur infliger.

Par Marat, l’Ami du Peuple.


  1. On ne me reprochera pas, sans doute, d’établir ici une doctrine nouvelle. J’ai démontré, dans mon Plan de législation criminelle, que le régicide n’est qu’un délit particulier ; et les raisons que j’en ai données sont si décisives, que Joseph II a promulgué une loi expresse pour consacrer cette vérité. Or, dans ses États, le meurtrier de l’Empereur ne devait plus être puni que comme simple assassin.

    Ce n’est pas que dans les conjonctures actuelles la mort de Louis XVI ne fût un vrai malheur pour la nation ; non comme l’entendent ses vils esclaves ; mais parce qu’il est précisément l’homme qu’il nous faut : sans projets, sans artifice, sans astuce, sans finesse, peu redoutable à la liberté publique, il serait un bon prince, s’il avait assez de tact pour avoir des ministres sages : mais hélas ! ses ministres atroces rendent son règne aussi affreux que celui des tyrans. (Note de Marat)