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sabine

Elle regardait son tuteur de ses yeux troublants remplis de philtres mauvais, la joue émaillée d’une rougeur.

— Écoutez donc, acheva-t-elle de cet accent envolé dont elle seule avait le secret ; écoutez donc ; ce petit groupe de fibres et de muscles, ce faisceau de nerfs qui a nom Sabine, détermine une fille de la décadence du Bas-Empire, de tout ce que vous voudrez de bon ou de perversif ; mais les quatre ou cinq pouces de chair dont il est formé exigent impérieusement les sensations de l’existence parisienne, et se refusent à se laisser pétrir dans les moules à pâtisserie de la province.

— En sorte, conclut Renée en cessant de froisser les journaux, que si M. Raimbaut tenait un peu à prolonger son séjour dans ses terres…

— Dame ! je ne dirais certes point : Voici la servante du Verbe ; qu’il me soit fait selon sa volonté.

Il y eut un silence. Henri et Renée restaient enfouis dans la pesanteur de leur rêve.

Sabine contemplait son pied dont le bas était en train de rosoyer à la flamme. Elle le caressa une minute, et prit sur la cheminée un petit volume de Molière, édition diamant.

Un coup de sonnette et une porte refermée retentirent.

— M. Raimbaut ! jeta la voix d’un domestique.

Quelle nouvelle ? s’exclama joyeusement Mme de Sérigny allant au-devant de lui.