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sabine

articulations de la mâchoire se détendirent, et la bouche de la morte bâilla subitement. Frissonnette recula un instant en proie à une vague terreur qu’elle s’efforça de maîtriser. Le tremblement nerveux qui agitait son corps, et auquel la petite fille devait son sobriquet de Frissonnette, ce tremblement la reprit de plus belle ; mais, enfin, ses doigts réussirent à aller chercher derrière la tête de sa mère une gerbe de cheveux refoulés sous le bonnet encore humide des sueurs de l’agonie. À ce moment Mme Lebas reparut.

— Tiens, v’là les ciseaux. T’as dénoué le bonnet ? ça va être tout un attirail pour l’remettre. T’aurais dû penser à ça, hier. Voyons, veux-tu que j’t’aide ?… Tourne-la du côté du mur. Tu vois bien que tu couperas de travers sans ça.

Mais, en offrant ses services, Mme Lebas restait à l’écart ; une répugnance invincible la clouait à sa place.

Le bruit des branches des ciseaux s’ouvrant, se rejoignant dans la chevelure, annonça que l’opération était achevée.

— Rends-moi mes ciseaux, fit Mme Lebas à Frissonnette, en train de tirer délicatement les deux longues et larges tresses qui bouclaient du bout.

La jeune fille obéit, et Mme Lebas s’empara de ses ciseaux, se disant, en elle-même :

— Il ne faut pas que j’les laisse ici ; demain, quand on procédera à l’inventaire pour le terme à échoir, on pourrait les saisir comme ayant appartenu à