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Page:Marc de Montifaud Sabine 1882.djvu/270

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sabine

— Non, mais si j’avais suivi votre pensée, en moi-même ?

— Alors, la conclusion serait, monsieur ?…

— Que les hommes ont inventé la maladie, mais qu’ils demandent à la guérir, madame, c’est un peu leur droit.

C’était la première fois qu’on osait lui insinuer un semblant de proposition en face. Or, persuadé que Sabine était la fille naturelle de Duvicquet et que cette liaison formait un monstrueux inceste, le jeune publiciste n’hésitait plus, se reconnaissant autant de droits qu’un autre à ce friand morceau.

— Vrai Dieu, reprit-elle en le regardant en face, je crois, en effet, que vous seriez disposé à me prendre à qui m’a, en cet instant, sachant que celui-là n’est pas mon mari.

Il recula, effrayé de l’audace d’un tel aveu.

— Madame, de grâce… M. Raimbaut n’est pas loin…

— Et quand il serait près ? J’ai certes le droit de répondre que celui auquel vous prétendez vous substituer m’aura, parce qu’il m’a toujours eue, parce que la fièvre qu’il a allumée dans mon sang y brûle depuis mon enfance. Seulement, je le répète, comme ce n’est pas à mon mari que j’appartiens, vous vous dites que vous pouvez me cogner l’épaule et me faire signe. Mon Dieu, oui, l’un des chaînons de la légalité est déjà descellé ; alors vous pensez : — C’est une déclassée, puisqu’elle aime ; je pourrais peut-être hésiter à m’en emparer dans le lit conjugal,