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Page:Marcel Schwob - Œuvres complètes. Écrits de jeunesse.djvu/157

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tombera, que les fruits mûriront — que cela agira sur les autres comme aujourd’hui sur nous — et pourtant cela n’agira pas sur nous !

Penser à toutes ces merveilles de la ville et de la campagne, et que d’autres y prennent grand intérêt — et nous n’y prendrons pas d’intérêt !

Penser combien nous sommes avides à construire nos maisons !

Penser que d’autres seront juste aussi avides, et nous totalement indifférents !

Je vois un bâtir la maison qui lui sert peu d’années, ou septante ou octante années au plus.

Je vois un bâtir la maison qui lui sert plus longtemps que cela.

Des lignes lentement mouvantes et noires rampent sur toute la terre — elles ne cessent jamais — ce sont les lignes des funérailles.

Qui était Président a été enterré, et qui est Président sera sûrement enterré.


Pourquoi les murailles du palais paraissent-elles

Si rouges ? Pourquoi la lumière sacrée rayonne-t-elle

Si rouge à notre vue,

Par les nuages et les brumes tristes ?

Quelle humidité, quel brouillard couvre

Le pur, jamais taché,

Et éclatant saphir ?

La flamme, l’éclat, le feu

De l’étincelante Toute-Puissance ?

Pourquoi La Lueur profonde de Dieu

Paraît-elle noire comme le sang ?

Comme ce fruit joyeux luit de pourpre et d’or.

(D’après Walt Whitman.)