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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

des pauvres ; et les riches avaient tant fait pour eux que les pauvres ne sentaient presque pas le besoin de travailler ; ceux des paroisses voisines, attirés par ces libéralités, étaient accourus en foule ; et bientôt, malgré toutes leurs largesses, les riches s’étaient vus de nouveau entourés de misère. Convaincus enfin qu’ils créaient la pauvreté, et voulant la soulager, ils résolurent de changer de système. Ils établirent des sociétés pour recevoir et faire profiter les épargnes des pauvres laborieux ; et les sommes que ci-devant ils distribuaient en aumônes furent souscrites dans ces sociétés, de manière à procurer d’amples secours à ceux de leurs membres qui tombaient dans le besoin. Le résultat de ce nouveau plan fut que les pauvres inactifs se retirèrent, et que les industrieux furent dans l’aisance, en sorte que le village prit un nouvel aspect, et que l’indigence et la misère en furent presque entièrement bannies.

Il s’est formé dernièrement en Écosse un établissement plus avantageux encore à la classe pauvre, et que l’on s’empresse de multiplier en Angleterre. « L’objet de cette institution, dit le Journal d’Édimbourg, n°. 49, est d’ouvrir aux classes inférieures du peuple un dépôt pour leurs petites épargnes, avec un intérêt raisonnable pour chaque mois, et pleine liberté de retirer tout ou partie à volonté, en tout temps ; facilité que les banques ordinaires ne peuvent point offrir. Cet établissement se nomme caisse d’épargne. »

Ces institutions donnent à l’industrie le plus grand encouragement, parce qu’elles assurent la propriété du pauvre laborieux. Que de fois un homme actif et industrieux, après avoir accumulé une petite somme, s’est laissé tenter par un billet de loterie, par une table de jeu, par quelque spéculation hasardée, ou l’a prêtée à un faux ami, sans parler du risque de vol ! Si l’on parvient à établir des caisses d’épargne en différents districts d’Angleterre, où les pauvres puissent déposer sans difficulté les petites sommes qu’ils gagnent, avec un modique intérêt, qui soit pour eux un motif de plus à le faire, ces malheurs seront évités, et il y aura lieu d’espérer que l’influence des habitudes de prudence élèvera insensiblement le pauvre au-dessus de la ressource avilissante de l’assistance paroissiale ; qu’elle permettra quelque jour d’abolir la taxe des pauvres, taxe qui pèse si durement sur la classe moyenne, et qui pro-