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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

MADAME B.

Cela est vrai ; mais prenez garde d’estimer le revenu d’un pays de la même manière, car vous tomberiez dans des calculs erronés. Supposons, par exemple, que mon revenu soit de 10 000 liv. ster. par an, et que j’en paye 500 pour la rente ou le loyer de la maison ; il est clair que ces 500 liv. st. sont une portion du revenu de mon propriétaire de maison ; puis donc que la même propriété, pour cela seul qu’elle est transférée de l’un à l’autre, peut devenir successivement le revenu de plusieurs individus, le revenu du pays ne peut pas être estimé par la somme des revenus de tous les individus.

CAROLINE.

Le même raisonnement ne s’applique-t-il pas à la dépense du pays ; puisque 500 liv. st. par an, que vous dépensez au loyer, seront ensuite dépensées, de quelqu’autre manière, par votre propriétaire de maison ?

MADAME B.

Il est vrai, car dépenser de l’argent n’est autre chose qu’échanger une chose contre une autre d’égale valeur ; c’est donner, par exemple, un shelling contre un pain, ou cinq guinées pour un habit. Au lieu du shelling, ou des cinq guinées, vous aurez le pain ou l’habit ; ainsi on est tout aussi riche après qu’avant les achats faits.

CAROLINE.

Si cela est, pourquoi donc s’appauvrit-on en dépensant son argent ?

MADAME B.

Ce n’est pas en achetant, mais en consommant les choses achetées, que l’on s’appauvrit. Quand nous avons mangé le pain et usé l’habit, nous sommes plus pauvres d’un shelling et de cinq guinées que nous n’étions auparavant.

Un boulanger n’est pas plus pauvre pour acheter cent sacs de farine, ni un tailleur pour acheter cent pièces de drap, parce qu’ils ne consomment pas ce qu’ils achètent.

Quand un homme achète des marchandises en vue de les revendre, il fait un commerce, et c’est son capital qu’il place de la