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CONTES POPULAIRES

des objets manufacturés que nous pouvons en avoir de leur blé ; de manière que s’ils manquent de drap, comme nous manquons de blé, nous devons souhaiter réciproquement d’échanger l’un contre l’autre. Mais quel rapport ceci a-t-il avec ce que je vous disais ?

— C’est qu’on aura besoin de beaucoup plus d’ouvriers dans les manufactures, pour fabriquer les étoffes qui serviront à payer le blé ; ainsi, l’on continuera à occuper tout autant de bras, mais seulement d’une manière différente.

— Et pourrez-vous quitter les champs pour la fabrique, comme vous allez de la charrue à la grange ?

— Je vous accorde, reprit Hopkins, qu’il y aurait un mauvais moment pour quelques-uns d’entre nous, ainsi qu’il arrive à chaque innovation, lors même qu’elle est pour le bien général.

— Et n’est-ce pas une excellente raison pour désirer que les choses restent ce qu’elles sont ? Il vaut mieux, je crois, nous en tenir à ce qu’ont fait nos ancêtres.

— Lesquels ? demanda John, car nos ancêtres, depuis Adam jusqu’à ce jour, n’ont jamais cessé de découvrir et d’inventer de nouvelles choses. Il y eut un temps où l’on ne labourait pas la terre ; peu après on prit la bêche et on sema quelques champs de blé ; plus tard on inventa la charrue, ce qui fut une découverte très-utile, quoiqu’elle ruina bien des gens ; ensuite vinrent les métiers, et enfin les machines à vapeur, qui sont pour ainsi dire les mères de nos fabriques. Vous voyez, maître Stubbs, que si nous ne faisions aucun changement utile, nous serions en arrière de nos ancêtres, qui rougiraient de nous, et nos descendants ne nous devraient aucune reconnaissance. Non, non, nous suivrons les traces de ceux qui nous ont précédés, non pas en faisant servilement ce qu’ils ont fait, mais en les imitant dans leurs progrès continuels, dans leur marche toujours dirigée vers de nouveaux perfectionnements, et nous laisserons ainsi un bon exemple à nos enfants.


FIN.