Page:Marchand - Nos travers, 1901.djvu/102

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
106
NOS TRAVERS

Mais tout est bon pour empêcher un mauvais mariage, — la distraction, les voyages, la réclusion forcée, la férule même !

Il ne faut pas trop se hâter de jeter au feu la salutaire férule, ni laisser trop tôt sa fille juge de sa conduite et maîtresse de ses actions.

Les parents ne sont-ils pas payés pour savoir que seule l’expérience rend sage et qu’en faisant la jeunesse l’arbitre de son avenir ils l’exposent à de funestes méprises ?

Les victimes de leur nonchalante condescendance joindront plus tard leurs reproches à ceux que ces parents se feront eux-mêmes devant le résultat de leur incurie.

Les unions hasardées qu’on voit tous les jours se contracter sous le seul prétexte « qu’on s’aime » — et encore comprend-on bien ce grand mot ? — ne tournent pas toujours mal.

Il est notoire en effet que les ménages canadiens sont le modèle des ménages unis.

Mais y est-on vraiment heureux, et cette paix qu’on y goûte n’est-elle pas trop souvent le fruit de sacrifices qu’un peu plus de sagesse dans le choix de son conjoint, eût rendus inutiles ; n’a-t-elle pas été conquise dans les premières années de vie commune par un travail d’assimilation orageux ?

Cette sérénité qu’on remarque partout, êtes-vous bien sûr que ce ne soit pas dans un grand nombre de cas une résignation silencieuse ou de l’abnégation héroïque ?

Qu’on ne se hâte pas de conclure. Le problème vaut qu’on l’étudie à fond.

Un psychologue moderne a noté « qu’on aime un type, c’est-à-dire la réunion dans une seule personne de toutes les qualités humaines qui peuvent nous séduire isolément chez les autres. »

Croit-on que la rencontre d’un pareil idéal soit tou-