Aller au contenu

Page:Marchand - Nos travers, 1901.djvu/214

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

LE FÉMINISME


Conférence faite à l’Asile de la Providence



Eh ! de quoi vous parlerais-je, Mesdames, si ce n’est de « nos affaires ? » Je crois même que c’est le seul moyen de me faire absoudre de ma hardiesse. Il paraît que c’est une prérogative masculine que de parler haut, du moins à cet égard, l’usage fait loi, et il faut toujours respecter la loi quelque injuste, je veux dire, quelque sévère qu’elle nous paraisse.

Il me semble que tout ici autorise l’audace. Le bruit de notre voix qui nous effraie toujours un peu, trouve entre ces murs, un écho sympathique et rassurant.

Nous nous sentons presque justifiée d’oser nous affirmer à l’ombre de cette institution puissante qui est l’œuvre de mains, surtout, de cerveaux féminins.

J’ai besoin de croire d’ailleurs que nous sommes « entre nous », et, « qu’officiellement », il n’y a ici qu’une femme s’adressant à des femmes. Si par hasard il s’était glissé dans cet auditoire quelques représentants du sexe fort, je veux l’oublier. Si pourtant leur dignité m’impose l’évidence, je me persuade qu’ils sont tous des féministes. Il ne faudrait pas qu’ils protestassent parce qu’alors je serais très dure pour eux. Je les comparerais à des paralytiques guéris disant du mal des béquilles ; oui, je les appellerais des ingrats !

Féministes, Mesdames, quoi qu’ils disent, tous les hommes le furent une fois, et ils le redeviendront, n’ayez crainte. Ils le seront quelque jour, comme les vieillards qu’abrite ce toit hospitalier le sont, et quand ils ressentiront toute la vérité de cette parole de l’Esprit-Saint : « Malheur à l’infirme qui n’a que des cœurs