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Page:Marchand - Nos travers, 1901.djvu/22

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LA VIE DES CHAMPS

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J’aime cette parole d’un saint, qui fut en même temps un homme d’esprit — ce qui ne gâte rien : « Il faut demeurer en la barque en laquelle on est. »

Il y a au delà de deux cents ans que l’aimable évêque de Genève, François de Sales, écrivait cela. Il est donc à présumer qu’on voyait déjà de son temps, des gens cherchant le bonheur dans l’impossible et en dehors de la sphère où Dieu a voulu qu’ils le trouvassent.

Ce travers est commun de nos jours. Souvent la tranquillité, le contentement, l’aisance sont là tout près de nous et nous faisons de grands frais pour courir les chercher au loin.

Quand on voit des milliers de nos frères vivant sous un ciel étranger, on se demande avec tristesse si notre pays n’était pas assez grand pour les contenir, ou si les lois en étaient trop dures ou le climat trop inhospitalier.

Dans aucune de ces alternatives on ne trouve la raison déterminante de l’exil de nos compatriotes. C’est pour d’autres motifs qu’ils vont porter le trésor de leur activité, le formidable effort de leur nombre et les ressources du génie national chez une nation étrangère que ce concours enrichit, comme, sous Louis XIV, les Français huguenots le firent en faveur de l’Angleterre et d’autres pays ennemis.

Pourquoi ce besoin contagieux de s’expatrier ?

D’où vient cette insouciance qui fait qu’on passe d’un cœur léger de la situation de maître chez soi à