Page:Marco Polo - Le Devisement du monde, 1556.djvu/110

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chans contre eulx en bataille rangée, ilz furent grandement effrayez, car ilz attendoient encores le ſecours du Roy Caydu, auquel ilz avoient leur pluſgrande fiance : & ſoubdainement coururent au pavillon de Naiam pour l’en advertir, lequel ilz trouverent couché avec une concubine qu’il avoit amenée avec luy. Lors Naiam promptement ſe reſveille, & en la plus grande diligence qu’il peult, miſt ſes gens en ordre, & par bandes. Or tous les Tartares ont de couſtume au paravant que d’entrer en bataille, de premierement ſonner les trompettes, tabourins, phiffres, & autres inſtrumens de guerre, & oultre chanter à haulte voix, & juſques à ce que le Roy leur ayt baillé ſigne de marcher & courir ſus à l’ennemy. Ainſi apres que les deux armées eurent finy leurs ſons & clameurs, l’Empereur commanda ſonner l’alarme & Bataille.donner dedans les ennemis : ce que promptement fut faict, & commencerent à tirer de leurs arcz de telle furie que les fleſches & ſagettes tumboient du ciel druz comme greſle. Et apres que le traict fut ceſſé, prindrent leurs lances & eſpées & vindrent à eulx joindre & approcher, recommençans la bataille plus furieuſement que devant : & lors y eut grande occiſion & tuerie d’une part & d’autre. Or ce Naiam eſtoit Chreſtien de nom, & profeſsion, combien qu’il fuſt mauvais obſervateur de la foy Chreſtienne, & en fiſt mal les œuvres, ce neantmoins avoit faict mettre en ſon principal guidon & enſeigne, le ſigne de la croix & avoit grand nombre de Chreſtiens en ſon camp. La bataille dura depuis le poinct du jour juſques à midy