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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/121

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la mangent en salade et en font des cataplasmes pour les maux d’yeux. J’ai pu juger de son infaillibilité comme remède, l’ayant administrée moi-même à une samba, dont l’œil gauche, par suite d’une altercation conjugale, était sorti de son orbite et pendait sur la joue de la malheureuse ; figurez-vous, monsieur, une masse de chair sanglante, qui ne permettait de découvrir ni le blanc du globe, ni le noir de la prunelle, quelque chose d’horrible à voir. J’appliquai immédiatement un emplâtre de matecllu sur la partie lésée, et, deux heures après, l’œil s’était rétabli de lui-même dans son poste accoutumé. Le surlendemain, la femme était parfaitement guérie. J’eus l’occasion de revoir ma samba deux ou trois ans plus tard, et lui avant demandé des nouvelles de son œil malade, elle me répondit qu’elle voyait bien mieux de cet œil que de l’autre.

— Peste ! monsieur Tamal, m’écriai-je malgré moi, émerveillé d’une si belle cure, savez-vous que voilà un secret capable d’enrichir l’homme qui le possède ? Je m’étonne que vous n’ayez pas cherché à en tirer parti.

— Hélas ! monsieur, me répondit-il, il eût fallu pour cela des protections qui m’ont toujours manqué ; le vrai mérite est modeste, vous le savez, et ma timidité s’effrayait à l’idée de faire mes propres éloges, seul moyen, dit-on, d’attirer l’attention, Une seule fois, il y a de cela quelques années, j’osai sou-