Aller au contenu

Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/277

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nous envelopper d’une atmosphère ténébreuse, que l’éclair et la foudre illuminaient à l’envi ; ces tempêtes duraient une heure, quelquefois deux. Pendant ce temps, la neige ne cessait de tomber à larges flocons, tantôt précédée et tantôt suivie d’une pluie de grêlons, dont les projectiles avaient le plus souvent, la grosseur d’un pois chiche, mais parfois aussi celle d’une prune.

C’est par une de ces tempêtes, née avec l’aurore, que j’atteignis, entre onze heures et midi, la bourgade de Coporaqué, chef-lieu de la province de Canas ; au sortir de tant de rancherias et de pueblos enfouis dans la neige et peuplés d’insectes parasites, Coporaqué me fit l’effet de Paris ou de Londres, avec sa grande place ornée de six arceaux, aboutissant à six ruelles, son église à clocher carré portant le nom du fondateur d’icelle, — don Salvador Sandoval Tecsitupa Inca, — tracé en lettres rouges au-dessus du porche, avec la date de 1654. Comme on m’avait vanté l’esprit évangélique du curé de Coporaqué, j’allai sans hésiter frapper à la porte de sa demeure, ne doutant pas que ma mine piteuse, mon feutre aplati par la grêle et mes habits ruisselants d’eau, n’excitassent sa compassion ; une lettre du prieur du couvent de la Merci de Cuzco devait contribuer à réchauffer sa charité, si par hasard ce jour-là elle était attiédie.

Mais je n’eus pas besoin de recourir à ce moyen,