ne l’aurais pas supprimé au moment d’accomplir ce voyage que je désirais ardemment et pour lequel j’ai fait tant de sacrifices.
« Je fais appel à l’intelligence des juges. Il n’est pas que l’absence de preuves : personne ne peut trouver de motif plausible à cet acte dont on m’accuse. »
Avec flegme, le docteur Ibrahim reprend :
— Soit ! Mais tu connais la loi du Coran ; quand un moribond nomme son assassin, il n’est besoin ni de jugement, ni de témoin pour condamner à mort.
Je proteste :
— Soleiman ne m’a pas nommée, je l’ai dit quand je le croyais vivant, je le répète maintenant qu’il est mort.
— Un homme a été trouvé dans ta chambre.
— Oui ! mais, au yeux des Français, il est tout naturel pour une femme de passer la soirée avec un ami.
— Tu n’es plus Française, tu es Nedjienne et musulmane.
— Musulmane, oui ! Nedjienne, non, je ne connais pas encore votre pays et presque pas votre langue.
— L’adultère est en tout cas puni de mort chez les musulmans. Et l’adultère, c’est quand une femme est avec un autre homme que son mari.
— L’homme est condamné à mort, et la femme ?
— Les femmes aussi…
J’ai compris, c’est la mort pour moi. Je devine dans ces trois mots ma condamnation certaine.
— Comment me tuera-t-on ?
— C’est délicat. Les femmes ne sortent guère des harems, il y a deux cents ans qu’on n’en a pas exécuté. Nous ne savons pas encore comment on