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Page:Marguerite de France - Memoires et Lettres.djvu/126

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[1577]
MÉMOIRES

aux Allemands, ne donnoient peu de merveille à nos François, ne leur estant commun de voir des horloges representer une agreable musique de voix, avec aultant de sortes de personnages que le petit chasteau que l’on alloit voir pour chose rare au faulxbourg Sainct-Germain. Monsieur le comte de Lalain, ceste ville estant de son gouvernement, fist festin aux seigneurs et gentils-hommes de ma trouppe, remettant à Mons à traicter les dames, où sa femme, sa belle-sœur madame d’Aurec[1], et toutes les plus apparentes et galantes dames de ce pays-là m’attendoient pour me recepvoir, où le comte et toute sa trouppe me conduisit le lendemain. Il se disoit estre parent du Roy mon mary, et estoit personne de grande authorité et de grands moyens, auquel la domination de l’Espaignol avoit tousjours esté odieuse, en estant tres-offensé depuis la mort du comte d’Egmont[2], qui luy estoit proche parent. Et bien qu’il eust maintenu son gouvernement sans estre entré en la ligue du prince d’Orange ny des huguenots, estant seigneur tres-catholique, il n’avoit neantmoins jamais voulu voir dom Jean, ny permettre que luy ny aulcun de la part de l’Espagnol entrast en son gouvernement ; dom Jean ne l’ayant osé forcer de faire au contraire, craignant, s’il l’attaquoit, de faire joindre la ligue des catholiques de Flandre, que l’on nomme la ligue des Estats, à celle du prince d’Orange et des huguenots,

  1. Diane de Dompmartin, marquise d’Havrec ou d’Havré.
  2. Lamoral, comte d’Egmond, prince de Gavre, exécuté à Bruxelles le 4 juin 1568.