merfide : car ie m’y eſtois deſia toute reſoluë, me ſouuenant d’vn compte, qui me fut faict l’année paẞée par vne bourgeoiſe de Tours, natifue d’Amboiſe, qui m’afferma avoir eſté preſente aux predications du cordelier dont ie vous veulx parler.
NOVVELLE VNZIESME.
res la ville de Bleré en Touraine, y a vn
village nommé Sainct Martin le beau, ou
fut appellé vn cordelier du couuent de
Tours, pour preſcher les aduents, & le careſme
enſuyuant. Ce cordelier plus enlangagé
que docte, n’ayant quelquesfois dequoy
payer pour acheuer ſon heure s’amuſoit
à faire des comptes, qui ſatisfaiſoient aucunement à ſes
bonnes gents de village. Vn iour de ieudy abſolut preſchant
de l’aigneau paſcal, quãd ce vint à parler de le manger de nuict
& qu’il veit à ſa predication de belles ieunes dames d’Amboiſe,
qui eſtoient lá freſchement aornées, pour y faire leurs paſques,
& y ſeiourner quelques iours apres : il ſe voulut mettre
ſur le beau bout, & demanda à toute l’aſsiſtance des femmes, ſi
elles ne ſçauoient que c’eſtoit de manger de la chair creuë de
nuict : Ie le vous veux apprendre, mes dames, ce diſt il. Les
ieunes hommes d’Amboiſe lá preſens, qui ne faiſoient que
d’y arriuer auec leurs femmes, ſœurs & niepces, & qui ne congnoſſoient
l’humeur du pelerin, commencerent à s’en ſcandaliſer :
Mais apres qu’ils l’eurent eſcouté d’auantage : ils conuertirent
le ſcandale en riſée, meſmement quand il diſt que
pour manger l’aigneau il falloit auoir les reins ceincts, des
pieds en ſes ſouliers, & vne main à ſon baſton. Le cordelier
les voyant rire, & ſe doubtant pourquoy, ſe reprint incontinent.
Et bien bien, dict il, des ſouliers en ſes pieds, & vn baſton
en ſa main : blanc chapeau, & chapeau blanc, eſt-ce pas tout vn ?
Si ce fut lors à rire, ie croy que vous n’en doubtez point. Les
dames meſmes ne s’en peurent garder, auſquelles il s’attacha