Aller au contenu

Page:Marguerite de Navarre - L’Heptaméron, éd. Lincy & Montaiglon, tome I.djvu/270

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
256
Ire JOURNÉE

luy feit porter ces parolles, &, en prenant ung de ses serviteurs par la manche de sa robbe, luy dist :

« Laissez-moy cestuy-cy &, incontinant qu’il sera temps, je vous envoiray quérir par luy ; mais, en actendant, allez vous reposer en vostre logis. »

Luy, qui ne se doubtoit poinct de la conspiration, s’y en alla.

Elle donna à soupper au serviteur qu’elle avoit retenu, qui luy demandoit souvent quand il seroit temps d’aller quérir son maistre ; elle luy respondoit toujours qu’il viendroyt assez tost. Et, quant il fut nuict, envoia ung de ses serviteurs secrètement quérir Du Mesnil, qui, ne se doubtant du mal que on luy préparoyt, s’en alla hardiment à la maison du dict Sainct-Aignan, auquel lieu la Damoiselle entretenoit son serviteur, de sorte qu’il n’en avoyt que ung avecq luy.

Et, quand il fut à l’entrée de la maison, le serviteur qui le menoyt luy dist que la Damoiselle vouloyt bien parler à luy avant son mary & qu’elle l’attendoyt en une chambre, où il n’y avoit que ung de ses serviteurs avecq elle, & qu’il feroyt bien de renvoier l’autre par la porte de devant, ce qu’il feit &, en montant ung petit degré obscur, le Procureur Sainct-Aignan, qui avoit mis des gens en embusche dans une garderobbe, commencea à oyr le bruict &, en demandant qu’est ce, luy fut dist