Page:Marguerite de Navarre - L’Heptaméron, éd. Lincy & Montaiglon, tome I.djvu/299

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QUATRIESME NOUVELLE


Un jeune Gentil homme, voyant une Dame de la meilleure Maison de Flandres, sœur de son Maistre, veuve de son premier & second mary & femme fort délibérée, voulut sonder si les propos d’une honneste amityé luy déplairoyent ; mais, ayant trouvé réponse contraire à sa contenance, essaya la prendre par force, à laquelle résista fort bien, &, sans jamais faire semblant des dessins & effors du Gentil homme, par le conseil de sa Dame d’honneur s’éloingna petit à petit de la bonne chère qu’elle avoit accoutumé luy faire. Ainsy, par sa fole outrecuidance, perdit l’honneste & commune fréquentation qu’il avoit plus que nul autre avec elle.


l y avoyt au païs de Flandres une Dame de si bonne Maison, qu’il n’en estoit poinct de meilleure, vefve de son premier & second mary, desquelz n’avoyt eu nulz enfans vivans. Durant sa viduité, se retira avecq ung sien frère dont elle estoit fort aymée, lequel estoit fort grand Seigneur & mary d’une fille de Roy. Ce jeune Prince estoit homme fort