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Page:Marguerite de Navarre - L’Heptaméron, éd. Lincy & Montaiglon, tome III.djvu/72

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Ve JOURNÉE

grandement tirer l’aureille pour en faire le second essay.

— Or de ma part, » dist Longarine, « je n’y trouverois point d’excuse, si ce n’estoit l’approbation de la foy du jeune homme, qui, se gouvernant en homme de bien, ne l’a point abandonnée, ains l’a bien voulue telle qu’il l’avoit faicte. En quoy il me semble grandement louable, veu la corruption dépravée de la jeunesse du temps présent. Non pas que pour cela je vueille excuser la première faulte, qui l’accuse tacitement, d’un rapt pour le regard de la fille & de subornation en l’endroit de la mère.

— Et point, point, » dist Dagoucin ; « il n’y a rapt ny subornation. Tout s’est faict de pur consentement, tant du costé des deux mères pour ne l’avoir empesché, bien qu’elles ayent esté déçeues, que du costé de la fille, qui s’en est bien trouvée : aussi ne s’en est elle jamais plaincte.

— Tout cela n’est procédé, » dist Parlamente, « que de la grande bonté & simplicité de la Marchande qui, sous tiltre de bonne foy, mena sans y penser sa fille à la boucherie.

— Mais aux nopces, » dist Simontault, « tellement que ceste simplicité ne fut moins profitable à la fille que dommageable à celle qui se laissoit aiséement tromper par son mary.

— Puis que vous en sçavez le compte, » dist Nomerfide, « je vous donne ma voix pour nous le réciter.

— Et je n’y feray faulte, » dist Simontault, « mais que vous promectiez de ne plorer point. Ceux qui disent, mes Dames, que vostre malice passe celle des hommes auroient bien à faire de mettre un tel exemple