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PEU ET MOINS

Prou estes nommé ; je vous feiz,
Mais avant moy estiez pourtant.

Prou.

Ha, Trop, pas ne vous congnoissoye ;
Je ne regardoys qu’au dehors,
Et d’aultre forme vous pensoye,
Car comme moy avez un corps.

Trop.

Au fondz de vostre cueur dedens
Je voy soit plaisir ou regret ;
A chacun vous fermer les dents,
Mais à moy ouvrez le secret.

Prou.

C’est raison que je vous descœuvre
Le fondz du cueur entièrement,
Et vous jugerez si mon œuvre
Est bonne à vostre jugement.

Trop.

O quel amour, ô quel lyen !
Mon filz, vostre cœur est semblable,
Faict & remply comme le mien ;
C’est conjonction admyrable.

Prou.

Le vostre toutesfoys ne voy,
Mais seulement, voyant la face,
Pareil au mien du tout le croy ;
Ce lien tous les autres passe.