Louis XI ; d’après lui, Charles n’aurait pas empoisonné sa femme, mais l’aurait fait noyer par sa mule. Or Guy Allard, qui a ignoré la patrie & le véritable nom de Charles (il l’appelle Soffrey Carles), qui s’est trompé dans toutes les dates importantes de sa vie & qui, dans ce récit de moins d’une page, a entassé un grand nombre d’erreurs, me paraît un mauvais guide dans cette matière ; je lui préfère, sans aucune hésitation, Marguerite de Navarre, qui avait vingt-six ans au moment de la mort de Charles, qui écrivait ses Contes vingt ans après cet événement & qui a dû connaître exactement les moindres détails de cette tragique aventure.
Le portrait de Jeffroy Charles nous a été conservé par un beau médaillon de travail italien, dont il n’existe, à ma connaissance, que trois exemplaires[1] ; il y est représenté de profil, vêtu d’une ample robe & coiffé d’un bonnet quadrangulaire ; sa chevelure est longue, son profil anguleux a de l’énergie. On lit tout autour :
IAFREDVS KAROLI IVRIS CONSVLTVS PRESES DELPHINATVS ET MEDIOLANI.
Le revers représente le même personnage, soutenu par un ange, suivant à travers des rochers un grand prêtre juif qui désigne du doigt le soleil, avec en légende le vers :
Qu’il ait aimé & protégé les lettres, cela n’est pas douteux. Il sauva de la prison, & peut-être de la mort, le célèbre imprimeur vénitien Alde Manuce, qui, pris en 1506 pour un espion par les troupes françaises, avait été enfermé à Caneto dans une dure prison[2]. Un grand nombre de savants italiens lui dédièrent leurs ouvrages, entre autres Jean-Paul Parisio, son commentaire sur le Ravissement de Proserpine de Claudien ; Jean-Marie Cattaneo, son édition des Lettres & du Panégyrique de Pline le Jeune ; Baptiste, de Mantoue, sa Vie de S. Denis, en vers latins ; Franchino Gafforio, son Traité de l’harmonie, &c. Quant à sa bibliothèque, elle devait être admirable, si l’on s’en rapporte au peu qui en reste, c’est-à-dire à six volumes seulement ; ces six manuscrits me paraissent mériter une description spéciale.
Le premier a passé de la bibliothèque de Charles dans celle du
- ↑ L’un au musée de Grenoble, l’autre au musée de Milan, le troisième dans ma collection.
- ↑ Voy. Biographie universelle.