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LA COCHE.

Qu’il la servit. Ailleurs son cœur ha mys,
Lequel ne peult endurer deux amys,
J’en suis bien seure.
Son desplaisir avec le mien je pleure.
En la cerchant il la fasche à toute heure,
Mais plus à moy,
En me laissant, dont suis en tel esmoy,
En telle ennuy ou nulle fin ne voy,
Qu’à bien grand peine
Se peult penser la douleur qui me meine.
Je me contrains, et ris, et fais la saine,
Et je me meurs.
Ces Dames cy, qui congnoissent mes mœurs,
Sçavent quelz maux, foiblesses et douleurs
Je dissimule :
Dont au dedens le double en accumule
Par desespoir, qui sans fin me stimule
De me donner
Du tout à luy ; mais, peur d’abandonner
Ces deux, me vient si tresfort estonner,
Que mieux veux vivre
En ce tourment, sans en estre delivre,
Que leurs deux cœurs à tel ennuy je livre.
Pour elles vis,
Et vivre veux du tout à leur devis,
Et pour moy non. Par quoy il m’est advis
Que pis que morte