Page:Marguerite de Navarre - Nouvelles Lettres, éd. Génin, 1842.djvu/161

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DE LA REINE DE NAVARRE.

fust à vous, DE LA REINE DE NAVARRE. ne le voudroys demander ; mais voyant l’estat où ils sont, et que, sans y donner ordre, il est impossible qu’il vous puisse suivre coume il desire, le desplaisir que ce me seroit de voir la maison où pour vostre service vous m’avez mise, en telle sorte qu’il feust contraint de vous importuner, et que la faulte feust par moy, m’a ousté la crainte de vous demander cet ennuyeux congié, qui ne se peult escripre sans tel regret que peult sentir la plus obligée personne qui oncques perdant pour ung temps plus desirée et estimée presence qui jamais ait esté veue. Et de tant plus je sens et connois le bien et l’honneur que ce m’est de l’avoir, de tant plus l’eslongner m’est importaible. Et n’estoit l’esperance de bientoust la recouvrer et de vous rendre le Roy de Navarre hors d’importunité pour vous et de honte pour luy, je l’eusse très voulontiers lessé fere le voyage tout seul. Mais je say bien, Monseigneur, que je ne vous puis mieux plaire que de m’acquitter où j’ay le devoir ; car tout l’honneur que je puis avoir tourne à vostre gloire, pour laquelle je desire plus garder mon honneur sans tache que pour la mienne propre. Vous suppliant très humblement, Monseigneur, vouloir ouïr ce porteur, par lequel vous connoistrez que je ne m’en vois pas si loing de vous sans assez d’occasions, auxquelles j’espère mettre si bonne fin, que vous aurez contentement du rapport et service de l’effet. Et pour la fin de ma très humble requeste, et pour le millieur et seul moyen de venir à fin de tous mes ennuis, je vous supplie que, selon ma foy, la part de vostre bonne grace ne me soit jamais diminuée. A