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MAIAKISIS

sions préparées à l’avance, et nous prîmes le large à force de rames. Il faisait une belle journée de mai, mais un peu froide. Je disais à mes petits sauvages :

— Ne regardez pas en arrière, de peur que le Père Supérieur ne change d’idée !…

Une heure après, les chalands touchaient terre et s’amarraient à un gros cèdre penché au-dessus de l’eau. Bientôt le bois retentit de coups de hache. Maiakisis, premier colon du Témiscamingue, abattait d’un bras joyeux les grands pins à panache, les verts bouleaux et les cèdres odorants !… Maiakisis arrachait les souches !… Maiakisis faisait de la terre !… Deux jours… Trois jours… Et le grain doré vole dans l’air, donne à la terre grise du Témiscamingue son premier baiser !

Il y a déjà longtemps de cela. Aujourd’hui, sur le site même, s’élève une grande église où, le dimanche, une foule d’hommes, de femmes et d’enfants s’assemblent, recueillis, pour écouter le successeur du P. Pian lire dans le livre sacré la belle parabole du semeur :… « Une autre partie tomba dans la bonne terre… »