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BRION

Repaires d’ombre des sous-bois, clairières herbues, falaises lumineuses, nous battons tout cela avec entrain durant deux heures, prenant un acompte de pure joie sur l’expédition que nous projetons pour demain, s’il plaît à Dieu.

Au phare, nous retrouvons, avec notre enfant prodigue, la figure souriante de l’hospitalité acadienne. La famille Richard est nombreuse, comme il sied, aimable et intéressante, tout entière consacrée à la garde du feu. Le phare est tout, ici, et on nous en fait les honneurs avec une fierté bien légitime. Le grand escalier intérieur est soigneusement peint de rouge et de bleu pour éviter les frictions politiques et parer économiquement aux changements de gouvernement. Tout reluit de propreté dans le plus parfait ordre, la lampe, le système optique et le délicat mécanisme d’horlogerie qui fait tourner l’écran de cuivre. Quel bon quart d’heure passé là-haut, sur l’étroit promenoir, à regarder par en-dessus la toison noire de Brion, la guipure rouge des caps et le merveilleux horizon d’eau bleue et d’îles semées !

Nous soupons tôt et bien, et comme le soleil est encore haut, nous enfilons allègrement le sentier fleuri d’euphraises qui, par les falaises, mène droit à la dune. Une descente abrupte comme un escalier, et nous y voilà ! Brion a cette originalité très grande dans l’archipel d’être à peu près libre de sables ; elle n’a guère que le