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barrière en ruine. Mais il y a là, tout près, attirant forcément l’attention, et émergeant encore de la végétation folle qui monte autour d’elle, une souche colossale d’où, comme de noirs serpents, d’énormes racines descendent, rampent sur le talus, traversent le fossé et disparaissent sous le macadam du chemin.

C’est, hélas ! tout ce qui reste de l’orme des Hamel.



Le dernier habitant de cette maison fut le défunt Siméon Hamel, mon grand-oncle, que j’ai bien connu ! La mort lui avait pris tous ses enfants et il vivait sur le bien, seule avec Marie, sa femme, une bonne vieille qui avait un fin petit visage plissé et qui nous laissait sans bougonner grappiller dans ses cerisiers.

Quelle famille, mes amis, que ces Hamel ! Il y a chez grand-mère une extraordinaire photographie, et nous autres, les enfants, quand on nous emmenait le dimanche souper à Lorette, nous passions de longues minutes, un doigt dans la bouche et silencieux, à regarder dans le cadre ces dix-neuf frères et sœurs, tous vieux à barbe et vieilles à capine, et dont le plus jeune, — c’était