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préface

toute loi morale ou sociale ? Prévenir une souffrance, empêcher un mal. Avant nos moralistes et nos législateurs, la nature a posé son code de morale : elle a mis le châtiment à côté du mal, la souffrance à côté de l’abus.

Mais si, pour prévenir les abus et les dangers réels de la polygamie, on tombe dans un mal pire, celui d’enchaîner pour la vie, comme deux forçats à un boulet, deux êtres qui se haïssent ; si l’on arrive à faire un enfer de cette vie conjugale qu’on a posée comme réalisant l’idéal de l’amour, n’est-il pas évident qu’il faut une loi qui brise le lien que la loi a formé, et qui répare les erreurs involontaires, si communes dans le mariage ?

Nous le répétons, l’intervention sociale ne peut être qu’une délégation des intéressés, et par conséquent ne doit pas s’exercer contrairement à leur vœu, à leur liberté intime et à leur bonheur.

Le but et la mission de la loi, c’est d’empêcher qu’on n’use de sa liberté pour faire tort à autrui. Son rôle dans le mariage doit être principalement de garantir l’exécution du contrat, de veiller à ce que les époux respectent leurs intérêts réciproques, et à ce qu’ils remplissent les charges et les devoirs de la paternité. Elle doit encore s’attacher à prévenir la démoralisation, la souffrance, l’appauvrissement social autant qu’individuel.

« Or, dans l’état de notre société, dit un de nos écrivains les plus autorisés, M. Legouvé, la théorie