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préface

sépare les biens et laisse la femme en tutelle du mari ; sépare les personnes, et laisse au mari la responsabilité des fautes de sa femme, qui peut encore déshonorer son nom. « En un mot, la séparation brise le mariage comme lien, et le maintient comme chaîne[1]. » C’est le divorce avec mille contradictions, mille douleurs, mille immoralités de plus.

Que deviennent, par exemple, les époux séparés, s’ils sont encore jeunes, et c’est presque toujours dans la jeunesse qu’on se sépare ? Le concubinage est nécessairement leur refuge. Cette position, fausse pour l’homme, est horrible pour la femme ; horrible aussi pour les enfants qui naissent de ces unions illégales.

À supposer que la femme reste honnête, quelle est sa situation dans le monde ? Personne ne croit à sa vertu. Si elle n’a pas d’enfants, quelle est son existence ? Quand descendant dans son triste cœur, si jeune encore, si plein de tendresse, elle ne rencontre que l’isolement, un isolement éternel, à quelles révoltes ne s’abandonne-t-elle pas ? Quel ressentiment n’éprouve-t-elle pas pour celui qui cause son malheur, et quels désirs monstrueux peuvent germer dans son esprit ?

Ah ! tout ce qu’il y a dans l’âme humaine de dignité et de sentiment de justice se soulève contre ce demi-divorce si cruel, si plein de souffrance et

  1. Legouvé.