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les forçats du mariage

Robert essuya une larme et sourit.

— Bah ! dans quinze jours elle ne pensera plus à moi, et le baron de T… recueillera mon héritage.

Il prit une feuille de papier encadrée d’une large bande noire, et traça rapidement ces mots :


« Ma chère Nana,

Tu sais l’événement funèbre. C’est dans deux jours l’enterrement de ton pauvre Robert. On se réunit après-demain 23 avril, dans son hôtel de la rue Montaigne. Invite tes amies. Convoi de première classe. Dîner de sept heures à dix ; de dix à trois heures du matin, bacchanale échevelée digne de la décadence romaine. Que dis-je ? Je veux que nous, pauvres petits crevés de la décadence parisienne, nous enfoncions ces grands Romains dont on rabâche depuis trop longtemps. À trois heures l’enterrement ; cotillon lugubre et carnavalesque. Les dames en dominos noirs, les hommes en croque-morts.

On parlera de cette fête dans la postérité la plus reculée.

Désarticule tes jarrets, aiguise ton esprit, chauffe ton entrain d’enfer. Je veux qu’on te porte en triomphe, et que les foules te proclament la reine du Sabbat.