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les forçats du mariage

car nous devons à tout prix détruire les soupçons de ton mari. Consens donc à partir pour Rio-Janiero. Mais une fois à Nantes, tu parviendras sans peine à le faire changer de résolution. Tu prétexteras une maladie, par exemple, et vous vous arrêterez au Croisic. Là, je tâcherai de t’aller voir. En tous cas, nous trouverons le moyen de correspondre.

Juliette, anéantie, incapable de lutter plus longtemps, finit par se rendre aux conseils de Robert.

Les adieux furent déchirants.

Quand Robert eut fermé la porte sur elle, il poussa un soupir d’allégement.

— Voilà une rupture, pensa-t-il, faite au bon moment. Les tiraillements, les chocs, les reproches, tout ce triste cortége du désenchantement allait commencer, tandis que nous conservons tous deux quelques illusions ; et les souvenirs agréables l’emporteront sur les souvenirs fâcheux.

Juliette, en sortant, ne remarqua pas une voiture qui stationnait devant le numéro 11. Elle descendit jusqu’à l’église, rentra par la porte de derrière, se jeta à genoux : et, se voilant le visage de ses mains, elle sembla prier avec ferveur.

À quelques pas d’elle, dissimulé derrière un pilier, Étienne l’observait, en proie à une sorte de rage blanche. Tant d’hypocrisie le révoltait, le dégoûtait.

Il n’y avait aucune hypocrisie pourtant dans