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les forçats du mariage

de valeurs à peu près entre les mains de M. Rabourdet, qui refuse de s’en dessaisir. Je suis donc dans une dèche complète. Que veux-lu que je fasse, avec 25, 000 francs de rente ? Je sais bien que beaucoup de pauvres diables se contenteraient de ce morceau de pain ; mais pour moi, c’est la misère. Il faudrait m’astreindre à de sordides lésineries ; il faudrait me dire à tout instant : si je dépense 10,000 francs à ce caprice, il ne me restera rien pour manger. Alors, ne pouvant résister à mes fantaisies, je continue à les satisfaire avec la même facilité qu’elles me viennent ; et je me trouve, comme avant mon mariage, criblé de dettes. Or, voilà les créanciers qui envahissent l’hôtel. C’est à fuir aux antipodes ; c’est à souhaiter de redevenir sauvage ou singe, pour aller vivre dans les bois.

— Pauvre malheureux !

— Ah ! ne te moque pas. Ma vie n’est pas gaie, va ! Mme Rabourdet me fait une mine longue comme ça. Pour elle, j’y suis habitué. Car dès le premier jour, elle m’a regardé comme un voleur qui venait lui dérober le cœur de sa fille. Maintenant elle me hait. Quant au beau-père, il était charmant avant l’élection. Tu sais qu’il comptait sur moi pour l’appuyer auprès de la noblesse ; mais depuis…

— Il a échoué ?

— À l’unanimité. Désastre honteux ! Alors c’est ma faute, bien entendu. J’y ai mis de la négligence, je n’ai pas su intriguer. Moi, intriguer pour