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LAI DU LAUSTIC.

les prés se couvrent de verdure, où les arbres des vergers sont en fleurs, les oiseaux font entendre les chants les plus agréables et célèbrent leurs amours, les deux amants deviennent encore plus épris qu’ils ne l’étoient. La nuit, dès que la lune faisoit apercevoir ses rayons, et que son mari se livroit au sommeil, la dame se relevoit sans bruit, s’enveloppoit de son manteau et venoit s’établir à la fenêtre pour parler à son ami, qu’elle savoit y rencontrer. Ils passoient la nuit à parler ensemble ; c’étoit le seul plaisir qu’ils pouvoient se procurer. La dame se levoit si souvent, ses absences étoient si prolongées, qu’à la fin le mari se fâcha contre sa femme, et lui demanda plusieurs fois avec colère quel motif elle avait pour en agir ainsi et où elle alloit. Seigneur, dit-elle, il n’est pas de plus grand plaisir pour moi que d’entendre chanter le rossignol ; c’est pour cela que je me lève sans bruit la plupart des nuits. Je ne puis vous exprimer ce que je ressens du moment où il vient à se faire entendre. Dès-