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LAI DE MILON.

portera votre missive. Elle profita du conseil, aussi après avoir eu grand soin de l’oiseau pendant un mois, elle le mit ensuite à la diète. La dame n’avoit gardé aussi longtemps l’oiseau que parce qu’elle ne savoit comment pouvoir se procurer de l’encre et du parchemin. La dame fit tant qu’elle parvint à se procurer les choses qui lui étoient nécessaires pour écrire. Elle fait sa lettre qu’elle scella de son anneau, et après avoir privé le cygne de nourriture, la dame la lui attache au col, et le met ensuite en liberté. Cet oiseau qui, par sa nature, mange beaucoup, étant affamé ne tarda pas à se rendre à l’endroit d’où il étoit sorti la première fois. Il prend son vol, vient à la ville, reconnoît la maison de son maître, aux pieds duquel il vient se placer. Milon voyant le cygne est au comble de la joie, il le prend par les ailes et le caresse. Puis appellant son dépensier, il lui ordonne de faire manger son oiseau. Avant de le lui remettre, il lui détache du col la lettre qu’il attendoit avec tant d’impatience. Son amante lui mandoit : Sans vous je ne puis vivre et goûter aucun