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LAI DE GRAELENT

apprit qu’elle arrivoit, l’assemblée sortit pour aller au-devant de la fée, et les barons ne pouvoient pas tarir sur ses perfections. Elle arrive à cheval jusqu’au pied du trône, et on ne peut l’en blâmer ; puis elle descend et laisse son coursier en liberté. La dame d’une manière fort gracieuse, s’exprima en ces termes : Sire, daigne m’entendre ; et vous aussi, seigneurs barons. Vous connoissez le motif de cette réunion ; c’est pour juger Graelent, qui parla publiquement au roi, lors de cette grande cour plénière, où la reine fut montrée et où son époux la présenta comme la plus belle femme qui jamais eût été vue. Il est vrai de dire qu’il parla mal puisqu’il a excité la colère de votre majesté. Mais il dit la vérité en avouant que nulle femme ne pouvoit m’être comparée relativement à la beauté. Regardez-moi, seigneurs, donnez votre avis ; je pense qu’après l’avoir fait connoître, Graelent doit être acquitté et le roi doit lui accorder sa grace. Tous les barons, d’un mouvement unanime, déclarèrent que la dame avoit raison et que ses suivantes surpassoient la