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LAI DE L’ÉPINE

Tous deux passèrent le gué[1], et le damoiseau ne vit pas sans émotion que son dernier adversaire étoit beaucoup plus fort que lui, et qu’il seroit infailliblement battu, si tous deux venoient l’attaquer-à-la fois. Mais, en y réfléchissant, il ne peut supposer que l’un veuille porter du secours à l’autre. Si l’un d’eux desire jouter, il doit le faire d’une manière loyale, et pour lui même seulement. Étant remontés tous les trois sur leurs coursiers, ils traversent la rivière ; et dès qu’ils ont atteint l’autre bord, un défi est proposé et accepté. L’un des chevaliers se place pour mieux juger des coups, et les deux autres s’apprêtent en attendant le combat. Le chevalier est bien satisfait d’avoir à jouter contre le damoiseau dont il estime le courage, qui, de son côté, voyant les manières nobles de ses adversaires, est entièrement rassuré au sujet des craintes qu’il

  1. Il faut qu’il y ait une lacune dans le manuscrit ; car sitôt le combat terminé avec le chevalier aux armes vermeilles, on voit le prince se mettre aux prises avec un second dont l’arrivée n’est point annoncée.