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LAI DE GUGEMER.

Le conte suivant, dont les Bretons ont fait un Lai, est de la plus grande vérité ; je le rapporte entièrement d’après les écrits de ces peuples, et en prévenant que cette aventure arriva fort anciennement dans la Petite-Bretagne.[1]

Au temps du règne d’Arthus,[2] ce prince eut parmi ses vassaux un Baron appelé Oridial[3], qui étoit seigneur de Léon. Le roi l’estimoit fort pour sa vaillance. De son mariage étoient nés deux enfants, un fils et une fille, nommés Gugemer et Noguent. Doués d’une figure charmante, ils étoient

  1. La petite Bretagne, la Bretagne françoise, pour la distinguer de l’Angleterre, dès-lors appelée la Grande-Bretagne. Voy. Ritson, Ancient engleish metrical Romanceës, t. III, p. 249 et 328.
  2. Artus, Arthur, Arthus, surnommé le Bon, roi de la Grande-Bretagne, élève de l’enchanteur Merlin, et chef de l’ordre de la Table-Ronde, institué par Uther Pendragon, son père. Voyez État de la poësie françoise dans les XIIe et XIIIe siècles, p. 151. Lantin de Damerey, Glossaire du roman de la Rose, au mot Artus. Ritson, loc. cit., t. III, p. 231.
  3. Ce nom d’Oridial peut être formé du bas-breton oriat, oriaden, badin, folâtre, amoureux. Voy. Pelletier, Dictionnaire de la langue bretonne, col. 660.